SPECTACLES

HU’LER COMME HIER

[Pièce 2025 – En création]

Il n’est pas aisé de se tenir debout au milieu des flammes, alors on les étouffe.
Mais à trop vouloir maîtriser l’incendie, ne risque-t-on pas de s’éteindre pour de bon ? C’est de cette interrogation qu’émergent des silhouettes, leurs corps, et bientôt leurs voix. Elles traversent un désert gelé où l’on ne s’exprime plus qu’à travers les vocaux WhatsApp, où la neige fond dans les narines, où l’on doit faire attention à ne pas rouler du cul, et où les hu’lements cherchent à se frayer un passage.
Il n’est pas aisé de se tenir debout au milieu des flammes, à moins d’en devenir une soi-même.

HU’LER COMME HIER entretient le souffle coupé, en nous tenant en haleine dans une oeuvre radicale à la fois physique, intime et universelle. La pièce explore l’équilibre complexe entre colère brûlante et intellect glacial, et par extension entre corps et esprit : où se situe-t-il, et comment y parvenir ?

Fresque picturale, plastique et sensorielle, les mots y sont une matière malléable, au même titre que le feu, la neige, les corps. Dans des tableaux mêlant imaginaire et réel – les vrais messages vocaux laissés par ses proches à l’auteur et restitués tels quels par les interprètes – la création explore le rapport de chacun à sa propre colère, de celle qui nous déborde à la révolte qui libère ; et la manière d’être “homme” autrement.
Une franche invitation à briser la glace dans un cri jubilatoire.

Création contemporaine théâtre et performance pour 4 interprètes
Création contemporaine originale pour 3 interprètes
Production Cᶦᵉ TRAÜ.ME
Texte et mise en scène Charles Mounal
Avec Charles Mounal, Chloé Dorémieux, Bastien Spiteri, Solène Cornu
Création lumière Laura Blanchard

NOTE D’INTENTION

« Dans tous les lieux habités par la souffrance se trouvent aussi les gués, les seuils de passage, les intenses noeuds de mystère. Ces zones tant redoutées recèlent pourtant le secret de notre être au monde, ou comme l’exprime la pensée mythologique : là où se tiennent tapis les dragons sont dissimulés les trésors. »
Christiane Singer

Charles Mounal : « C’est le point de départ de toutes mes créations : pour trouver la paix, je dois me confronter à mes propres dragons. Issu d’un milieu modeste où la violence côtoyait l’amour, je n’avais que la colère comme arme. A cinq ans, je prévenais ma première maîtresse : « Si tu me fais faire ce que je veux pas faire, je hu’le comme hier ». Je m’en suis extrait en choisissant le langage comme remèdes. Avant de réaliser, bien plus tard, que trop étouffer la colère risquait aussi de taire le corps et les émotions.

Développer la note d’intention

CREUSER L’INTIME POUR EXPOSER L’UNIVERSEL
Cette pièce est donc avant tout une quête, une recherche de lâcher prise sur les mots et de réconciliation avec mon corps, et avec moi-même. Tout est encore en chemin et c’est justement cet état intermédiaire, cette résilience progressive, que je souhaite exposer ; comme un appel à chacun.e à en faire autant s’iel le désire ».

FORME ET PROPOS
HU’LER COMME HIER se présente comme une succession de tableaux surréalistes dans un espace-temps volontairement non défini : des allers-retours entre souvenirs réinvoqués et distordus, et présent et avenir en hypothèses. Un espace proche du rêve, permettant aux spectateur.ice.s de tisser leurs propres interprétations. Les quatre interprètes y perdent littéralement leur capacité à hurler, et cherchent à la retrouver. Le désert de glace sur scène, manifestant l’avènement du langage, semble offrir un refuge rassurant. C’est en réalité plus complexe : le public assiste à une sorte de parcours initiatique au cours duquel ils vont devoir retrouver le feu – la colère – et apprendre à l’apprivoiser pour se libérer.
HU’LER COMME HIER explore aussi, en creux, ce qui empêche : le tabou des violences familiales, la virilité subie et la masculinité toxique ; les renoncements ; le virtuel comme subterfuge ; le conformisme et le travail salarié qui disqualifient l’action.
Mais la création expose et revendique aussi ce qui libère : la révolte ; l’acceptation de sa sensibilité et le renversement de valeurs dites masculines ; la compassion pour l’autre autant que pour soi-même ; la reconnexion au corps par le mouvement et la sexualité, l’altérité et le commun comme remèdes.
Dans sa forme, la pièce se défait des mots et de l’intellect seuls pour chercher dans les corps, les matières, le mouvement et l’imprévisible des moyens de se relier à soi et aux autres par le sensible, l’instinct, le toucher.

L’IRRUPTION DU REEL
L’action et l’imaginaire au plateau sont toujours mis en juxtaposition avec une incursion brute du réel : régulièrement, les interprètes munis d’oreillettes restituent des messages audios laissés à l’auteur par ses proches. Des messages souvent drôles et touchants dans lesquels la voix de l’émetteur original n’est jamais dévoilée, et n’a pas vraiment d’importance. Parents, ami.e.s ou collègues dressent tous.te.s le portrait indirect de l’auteur ; d’eux-même ; et d’un monde commun dont le public peut s’emparer. Un habillage sonore accompagne parfois la restitution, permettant au spectateur.ice de s’immerger et d’imaginer, sans montrer. L’interprétation créée néanmoins une distance avec le ton des messages originaux, leur donnant un tout autre sens.
Les interprètes sont parfois figures et personnages, parfois eux-mêmes, et le public est ponctuellement pris à parti de manière directe, ce qui permet de reforcer le contraste entre réel et imaginaire.

TEXTE, MATIERES, MOUVEMENT ET PERFORMANCE
Sur scène tout est gelé, des corps au décor. En apparence seulement, car HCH est un lâcher prise sur les mots et l’esprit où le « faire » reprend le pouvoir. Autrement dit, le mouvement a un rôle aussi important que la parole. Cela passe aussi par la performance : certaines scènes laissent la place à l’imprévu, pour laisser le spontané surprendre public comme interprètes. C’est donc avant tout un spectacle sensoriel, prenant une forme proche de la fresque, de l’impression. La scénographie très plastique, malléable, accompagne la libération des corps : les matières (glace, neige, feu, argile…) volent, s’étalent, s’écrasent contre les corps ; permettant de retrouver la vie dans le mouvement. Le choix d’exposer tous les accessoires permet au spectateur de projeter, d’imaginer et d’interpréter de plus belle : tout est utile, la question est de savoir quand, comment, pourquoi.

ÊTRE « HOMME » AUTREMENT
Pour me reconnecter à mon corps et à ma sensibilité, j’ai dû réinventer ma propre masculinité, en cherchant à sortir des modèles virilistes qui m’ont toujours violenté.
Pendant toute mon enfance et mon adolescence j’ai été traité de fille, de PD, dès que mon corps où mes émotions trahissaient ma sensibilité. HU’LER COMME HIER revendique la possibilité de rechercher et de porter en tant qu’homme d’autres codes, d’autres modèles,
et d’embrasser comme allié, mais aussi dans sa chair, les causes queer et féministes.

REHABILITER LA COLERE
« Si tu es en colère, on va te dire que tu n’es pas capable de raisonner logiquement. En Occident, la colère c’est l’ennemi de la réflexion, et dire ça c’est paternaliste. Ça veut dire que si tu es en colère, tu es primitif, tu ne sais pas organiser ta pensée. C’est une façon de te disqualifier, de disqualifier ton discours. »
Casey

Par ses thèmes et sa dramaturgie, HU’LER COMME HIER réhabilite du sentiment de colère en tant que composante noble, essentiel, subversive ; dans une société ou la disqualification des actes au nom de la pensée permet la perpétuation du statuquo. Pour reprendre la formule de François Bégaudeau, « c’est de ce mélange froidchaud que naissent les insurrections », et c’est bien la révolte que dessine en toile de fond la création. Non pas comme fin, mais comme moyen : agiter le corps et l’esprit, de manière brute et parfois frontale, mène à l’action. Chercher à bousculer (sans heurter) le public, faire appel à ses intuitions, son mouvement et son esprit ; c’est lui donner envie de trouver et d’embrasser sa propre colère, au nom de ses
propres luttes.

LUMIERE : DU GLACIAL AU BRÛLANT
L’enjeu est de donner vie à un désert de glace tout en conservant l’intime, l’humain ; par des lumières resserrées et un contraste fort entre les couleurs froides et le chaudes, comme le feu parfois réel. L’éclairage minimaliste mais pointu, participe de l’approche esthétique forte recherchée dans notre travail ; et sera au service des matières en mouvements – y compris la chair – déployées au plateau ; pour renforcer et souligner. Comme le reste du décor, les projecteurs sont visibles au plateau, participant à la volontée d’exposer et de mettre à nu sans fards.

PARTENAIRES

CALENDRIER

  • Octobre 2023 : Première résidence de création – EMS Barouf (Lilas en scène)
  • Septembre 2024 : Deuxième résidence de création – Nouveau Théâtre de l’Atalante.
    Sortie de résidence le 20 septembre 2024